Refonder l’école de la République : avec qui ?

Tribune publiée le 16 octobre 2012 dans le quotidien L’Humanité

En France, naître dans la pauvreté augmente les risques d’échouer à l’école. C’est une des plus grandes violences faite aux pauvres. Est-ce une fatalité ? Non. La plupart des pays développés font mieux que la France.

C’est pourquoi 12 organisations1 d’enseignants, de chefs d’établissement et de parents, y compris des parents vivant la grande précarité, ont travaillé toute l’année dernière pour aboutir à une plateforme citoyenne : « construire ensemble l’école de la réussite de tous2».

Ce travail a transformé les conflits entre les enseignants et les parents des milieux populaires, catastrophiques pour les enfants, en une alliance qui oblige le système à se questionner. La démarche3 a montré que les parents en situation de précarité sont des partenaires indispensables pour refonder l’école et permettre la réussite de tous les enfants.

Ils sont tombés d’accord sur la nécessité

  • du dialogue collectif parents-enseignants dans toutes les écoles en particulier en créant des espaces parents qui ont pour but d’intégrer les parents les plus éloignés de l’école ; des espaces enseignants pour relire leurs pratiques et des rencontres collectives parents enseignants

  • d’une évaluation individuelle entre parents et enseignants sur les talents et progrès de l’enfant.

  • de la généralisation d’une pédagogie de la coopération, essentielle pour ceux qui ont le plus besoin de l’école, et pour tous car appendre à penser ensemble est vital dans un monde en transformation

  • des projets culturels de qualité mobilisant ensemble école et quartier

  • d’une refonte de la formation au métier d’enseignant : apprendre à dialoguer avec les parents ; lutter contre les stéréotypes et connaitre les milieux populaires ; apprendre les pédagogies de la coopération.

Cette plateforme a été largement diffusée lors de la consultation « refonder l’école de la République » et nous veillons à ce que ses points essentiels soient introduits dans la nouvelle loi. Cependant l’école ne se réformera qu’avec la mobilisation de tous, dans chaque école, et dans tout le pays, de tous les enseignants, des parents de tous milieux, des enfants, de tous les citoyens et du gouvernement.

Fort de cet accord, ATD Quart Monde lance un appel

– à tous les enseignants : Croyez et continuez de croire que tous les enfants sont capables d’apprendre, croyez dans la vertu libératrice de l’éducation et du savoir partagé, dans l’importance de valeurs que vous incarnez : la qualité du savoir et le respect dans les relations. Acceptez d’être les alliés des familles les plus modestes dans leur combat pour que leurs enfants aient une vie meilleure. Acceptez de réinventer une école qui apprend à penser ensemble, en particulier avec ceux qui ont la vie la plus difficile.

– à tous les parents. Ne cherchez pas à faire de vos enfants des gagnants contre les autres, car ils seraient entourés de perdants. En matière d’éducation, il est possible que tout le monde gagne. Sachez que dans les pays qui développent la mixité dans les écoles et des pédagogies de la coopération, TOUS les enfants réussissent mieux. Croyez que vos enfants seront mieux armés dans la vie s’ils apprennent à vivre et à penser avec les autres. Pour bien vivre la mixité sociale à l’école, exigez pour vos enfants et pour tous les enfants une école de la coopération et de qualité.

– aux parents qui vivent la précarité, qui portent tant d’espérance dans l’école pour que leurs enfants « brisent la chaîne » de la précarité. Sachez que l’école ne se réformera en profondeur qu’avec vous, si vous apportez votre expérience et votre connaissance des conditions qui font que l’école peut être soit un lieu d’humiliation soit un lieu de libération.

– aux enfants et aux jeunes, qui n’aiment pas qu’on fasse des différences entre eux et qui veulent la paix à l’école. Vous êtes les premiers à pouvoir changer l’école en voulant que chacun puisse comprendre les autres et se faire comprendre des autres, en refusant qu’un enfant ou un adulte manque de respect à l’un d’entre vous, à celui qui a du mal à apprendre ou qui pense autrement.

– à tous les citoyens : refusez les stéréotypes qui font croire que les personnes en situation de pauvreté sont moins capables que les autres4. Refusez ceux qui affirment que les enfants défavorisés échouent à l’école parce que les parents se désintéressent de leur scolarité. Alors que ces parents défavorisés sont trop tendus, blessés par l’échec scolaire, souvent humiliant, de leur enfance. Alors leur communication avec l’école est conflictuelle.

– au gouvernement : Faites de la réussite de tous les enfants et les jeunes la priorité du quinquennat. Pour que l’éducation soit une vraie priorité dans notre pays, faites cesser la discrimination pour origine sociale et mettez en place des campagnes qui feront comprendre combien la stigmatisation pour origine sociale crée la violence, en particulier à l’école, et est préjudiciable à tous les citoyens.

1 SNES-FSU, SNPDEN, SGEN-CFDT, SNUIPP-FSU, FCPE, PEEP, APEL, ICEM-Freinet, GFEN, AGSAS, Association Montessori

3 Voir l’ouvrage Quelle Ecole pour Quelle Société ? (Pascal Percq, Ed Chroniques sociales- Ed Quart Monde)

4 Voir par exemple les réfutations du livre The Bell Curve de Murray par le département de sociologie d’Harvard

 

Refonder l’école de la République : avec qui ?

En France, naître dans la pauvreté augmente les risques d’échouer à l’école. C’est une des plus grandes violences faite aux pauvres. Est-ce une fatalité ? Non. La plupart des pays développés font mieux que la France.

C’est pourquoi 12 organisations1 d’enseignants, de chefs d’établissement et de parents, y compris des parents vivant la grande précarité, ont travaillé toute l’année dernière pour aboutir à une plateforme citoyenne : « construire ensemble l’école de la réussite de tous2».

Ce travail a transformé les conflits entre les enseignants et les parents des milieux populaires, catastrophiques pour les enfants, en une alliance qui oblige le système à se questionner. La démarche3 a montré que les parents en situation de précarité sont des partenaires indispensables pour refonder l’école et permettre la réussite de tous les enfants.

Ils sont tombés d’accord sur la nécessité

  • du dialogue collectif parents-enseignants dans toutes les écoles en particulier en créant des espaces parents qui ont pour but d’intégrer les parents les plus éloignés de l’école ; des espaces enseignants pour relire leurs pratiques et des rencontres collectives parents enseignants

  • d’une évaluation individuelle entre parents et enseignants sur les talents et progrès de l’enfant.

  • de la généralisation d’une pédagogie de la coopération, essentielle pour ceux qui ont le plus besoin de l’école, et pour tous car appendre à penser ensemble est vital dans un monde en transformation

  • des projets culturels de qualité mobilisant ensemble école et quartier

  • d’une refonte de la formation au métier d’enseignant : apprendre à dialoguer avec les parents ; lutter contre les stéréotypes et connaitre les milieux populaires ; apprendre les pédagogies de la coopération.

Cette plateforme a été largement diffusée lors de la consultation « refonder l’école de la République » et nous veillons à ce que ses points essentiels soient introduits dans la nouvelle loi. Cependant l’école ne se réformera qu’avec la mobilisation de tous, dans chaque école, et dans tout le pays, de tous les enseignants, des parents de tous milieux, des enfants, de tous les citoyens et du gouvernement.

Fort de cet accord, ATD Quart Monde lance un appel

à tous les enseignants : Croyez et continuez de croire que tous les enfants sont capables d’apprendre, croyez dans la vertu libératrice de l’éducation et du savoir partagé, dans l’importance de valeurs que vous incarnez : la qualité du savoir et le respect dans les relations. Acceptez

d’être les alliés des familles les plus modestes dans leur combat pour que leurs enfants aient une vie meilleure. Acceptez de réinventer une école qui apprend à penser ensemble, en particulier avec ceux qui ont la vie la plus difficile.

à tous les parents. Ne cherchez pas à faire de vos enfants des gagnants contre les autres, car ils seraient entourés de perdants. En matière d’éducation, il est possible que tout le monde gagne. Sachez que dans les pays qui développent la mixité dans les écoles et des pédagogies de la coopération, TOUS les enfants réussissent mieux. Croyez que vos enfants seront mieux armés dans la vie s’ils apprennent à vivre et à penser avec les autres. Pour bien vivre la mixité sociale à l’école, exigez pour vos enfants et pour tous les enfants une école de la coopération et de qualité.

aux parents qui vivent la précarité, qui portent tant d’espérance dans l’école pour que leurs enfants « brisent la chaîne » de la précarité. Sachez que l’école ne se réformera en profondeur qu’avec vous, si vous apportez votre expérience et votre connaissance des conditions qui font que l’école peut être soit un lieu d’humiliation soit un lieu de libération.

aux enfants et aux jeunes, qui n’aiment pas qu’on fasse des différences entre eux et qui veulent la paix à l’école. Vous êtes les premiers à pouvoir changer l’école en voulant que chacun puisse comprendre les autres et se faire comprendre des autres, en refusant qu’un enfant ou un adulte manque de respect à l’un d’entre vous, à celui qui a du mal à apprendre ou qui pense autrement.

à tous les citoyens : refusez les stéréotypes qui font croire que les personnes en situation de pauvreté sont moins capables que les autres4. Refusez ceux qui affirment que les enfants défavorisés échouent à l’école parce que les parents se désintéressent de leur scolarité. Alors que ces parents défavorisés sont trop tendus, blessés par l’échec scolaire, souvent humiliant, de leur enfance. Alors leur communication avec l’école est conflictuelle.

au gouvernement : Faites de la réussite de tous les enfants et les jeunes la priorité du quinquennat. Pour que l’éducation soit une vraie priorité dans notre pays, faites cesser la discrimination pour origine sociale et mettez en place des campagnes qui feront comprendre combien la stigmatisation pour origine sociale crée la violence, en particulier à l’école, et est préjudiciable à tous les citoyens.

1 SNES-FSU, SNPDEN, SGEN-CFDT, SNUIPP-FSU, FCPE, PEEP, APEL, ICEM-Freinet, GFEN, AGSAS, Association Montessori

3 Voir l’ouvrage Quelle Ecole pour Quelle Société ? Pascal Percq Ed Chroniques sociales- Ed Quart Monde

4 Voir par exemple les réfutations du livre The Bell Curve de Murray par le département de sociologie d’Harvard

Une réflexion sur « Refonder l’école de la République : avec qui ? »

  1. J’ai la preuve que les jeunes qui vivent dans une cité dite précaire peuvent réussir. Les enfants que j’ai encadrés dans l’association Raphaëlle Marie, pour le hip hop, sorties ludiques et culturelles. Encadrement dès la plus petite enfance, la primaire, ont réussis leur bac et sont dans les études falcultés et autres autres. Il aident de leur côté à leur tour les petits fréres et soeurs à s’en sortir aussi. C’est du courage tout cela. Et je ne veux pas que l’on disent que telle ou telle cité, les enfants ne vont pas à l’école ou réussissent pas si on ne leur donne pas les moyens humains et autres de s’en sortir. Il faut les écouter et savoir ce qu’il veulent faire. L’association Raphaëlle Marie permet de sortir les enfants de la cité pour aller visiter tel ou tel musée pour déveloper leur culture. Biensûr nous faisons des sorties ludiques. J’ai même emmené il y a quelques années des enfants au louvres car ils voulaient voir la joconde. Ils sont restés au moins un quart d’heure en admiration. Nous avons même visité l’assemblée nationale un samedi matin à la demande des collégiens qui l’avaien comme programme à l’école.
    Vous voyez si vous avez les moyens humains et de l’aide de l’état ou autre politique de la ville, nous pouvons sortir ses enfants et ses jeunes de la précarité en les faisant sortir de leur cité dans des endroits ludiques et culturelles.
    A bientôt.
    Adeline ZAFFIROFF

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